1. Qu’est-ce que le blanchiment d’argent ?

Le blanchiment d’argent, aussi appelé « money laundering » ou « blanchiment de capitaux », désigne un processus complexe. Il consiste à intégrer des fonds obtenus illégalement dans l’économie légale. L’objectif est de dissimuler leur origine criminelle. Ce procédé vise à rendre ces fonds légitimes en apparence. Cela permet aux auteurs des infractions de profiter de l’argent obtenu de manière malhonnête.

Le blanchiment d’argent implique généralement trois étapes principales, connues sous le nom de « cycle du blanchiment d’argent » :

Placement : C’est la première étape, où l’argent issu d’activités criminelles est introduit dans le système financier. Cela peut se faire de plusieurs manières. Par exemple, en déposant des liquidités dans des institutions financières. Cela peut aussi inclure des investissements dans des actifs ou l’utilisation des fonds pour des transactions.

Compte tenu des mesures de contrôle mises en place dans le secteur financier. Cette étape se limite généralement à de petites sommes. Les criminels approchent parfois des personnes économiquement défavorisées. Ils leur proposent de les rétribuer pour déposer des petites sommes sur leurs comptes. Ces fonds sont ensuite renvoyés vers les délinquants.

Stratification : Durant cette étape, l’argent est déplacé vers les délinquants et dissimulé de manière à rendre difficile sa traçabilité. Cela peut impliquer des transactions financières complexes, des transferts internationaux, des opérations en cryptomonnaie, etc. L’objectif est de brouiller les pistes pour éviter la détection.

Intégration : C’est la phase finale du blanchiment. L’argent est réintroduit dans l’économie légale de manière à sembler avoir une origine légale. Il peut ensuite être investi dans des biens immobiliers, des entreprises ou d’autres actifs. L’objectif est de générer des profits qui paraissent légitimes.

Le blanchiment d’argent est fréquemment associé à des activités criminelles telles que le trafic de drogue, la corruption, ou encore la fraude fiscale majeure. Mais il ne faut pas perdre de vue que d’autres formes de criminalité organisée génèrent des fonds illicites. Nous pensons à la prostitution, au trafic d’être humains, au trafic de déchets, ou encore au trafic de biens culturels.

Pour lutter contre ce phénomène, plusieurs mesures ont été mises en place :

  • Renforcement de la transparence financière.
  • Identification des transactions suspectes.
  • Sanctions sévères pour ceux qui participent au blanchiment d’argent..

2. Quels sont les conséquences du blanchiment d’argent ?

Le blanchiment d’argent a des conséquences importantes à plusieurs niveaux. Cela affecte à la fois les individus, les institutions financières, les économies nationales, et la société dans son ensemble. Voici quelques-unes des conséquences du blanchiment d’argent :

Stimulation de l’activité criminelle :
Le blanchiment d’argent permet aux criminels de tirer profit de leurs activités illégales en intégrant les fonds dans l’économie légale. Cela peut encourager davantage d’activités criminelles en rendant ces activités plus lucratives.

Financement du terrorisme : L’argent blanchi peut être utilisé pour financer des activités terroristes. En masquant l’origine des fonds, les criminels peuvent soutenir des organisations terroristes sans attirer l’attention des autorités.

C’est pourquoi le terme anglais ‘AML’ (anti-money laundering) se traduit en français par LCB/FT (lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme).

Corruption et déstabilisation politique :
Le blanchiment d’argent est souvent associé à la corruption, car il dissimule les pots-de-vin et les gains illicites. Cela peut conduire à une déstabilisation politique et économique, compromettant la confiance du public dans les institutions gouvernementales ou économiques.

Distorsion des marchés et de la concurrence et impact sur la stabilité économique :
L’argent blanchi investi dans des activités légales fausse la concurrence et les marchés. Certaines entreprises illégitimes bénéficient de conditions plus favorables. Cela leur permet de concurrencer déloyalement les entreprises respectant la légalité et les normes.

Il ne faut pas oublier que le système économique de l’Union européenne repose sur la création d’un grand marché unique. Ce marché vise à favoriser une concurrence saine. Le blanchiment d’argent va évidemment tout à l’encontre de ce principe.

Érosion de la confiance financière  :
Le blanchiment d’argent peut éroder la confiance dans le système financier ou économique. Les institutions financières impliquées dans des scandales risquent de perdre la confiance de leurs clients et investisseurs. Cette perte de confiance peut également s’étendre au grand public.

Il est bien connu que certaines banques liées à des organismes criminels ont opéré de manière visible. Elles ont même collecté des fonds auprès du grand public. Une fois le pot aux roses découverts, ces organismes ont été bloqués. Par conséquent, les épargnants de bonne foi ont eu toutes les peines du monde pour récupérer leur épargne. Quand ils l’ont récupéré …

Sanctions et Répercussions Légales :
Les individus et les entités impliqués dans le blanchiment d’argent sont passibles de sanctions sévères. Cela peut aller de peines de prison à des amendes substantielles. De nombreuses institutions financières bien connues  ne respectaient pas les réglementations anti-blanchiment. Elles ont été sanctionnées par des amendes importantes et leurs dirigeants ont fait l’objet de poursuites judiciaires.

EN CONCLUSION :
La lutte contre le blanchiment d’argent est cruciale pour maintenir l’intégrité des marchés financiers. Elle renforcer aussi la sécurité nationale et préserver la confiance dans les institutions. Les gouvernements, les institutions financières, et les organismes internationaux travaillent ensemble pour mettre en place des réglementations. Ils mettent en place également des mécanismes de surveillance visant à détecter et à prévenir le blanchiment d’argent.

3. La lutte contre le Blanchiment d’argent au niveau mondial.

La lutte contre le blanchiment d’argent est une préoccupation mondiale. De nombreux pays, institutions financières et organismes internationaux ont mis en place des mesures pour prévenir et combattre ce phénomène. Voici quelques-unes des principales stratégies et initiatives dans la lutte contre le blanchiment d’argent :

Cadre Légal et Réglementaire :
Les gouvernements ont voté et mis en place des lois et des réglementations spécifiques pour lutter contre le blanchiment d’argent. Ces lois imposent des obligations aux institutions financières et à d’autres entités. Le but est qu’elles mettent en œuvre des programmes de lutte contre le blanchiment d’argent (LCB/FT).

La fin de l’anonymat :
L’une des premières mesures prises a été d’interdire les comptes bancaires anonymes et la détention de sociétés par des parts sociales anonymes.

A la tête de la lutte de la lutte contre le blanchiment, on trouve le GAFI (Groupe d’Action Financière ou FATF Financial Action Task Force ). C’est est une organisation gouvernementale internationale située à Paris dans les locaux de l’OCDE.

Le GAFI vise à établir des normes non impératives. Celles-ci servent de lignes de conduite que les gouvernements doivent suivre pour promouvoir la lutte contre le blanchiment de capitaux. Ces normes sont regroupées sous la forme de 40 recommandations.

En conséquence, le GAFI mène des évaluations de ses pays membres en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Il émet des recommandations d’améliorations et surtout dresse des listes (grises ou noires) des pays dont le système anti-blanchiment est à améliorer.

La liste noire est celle des pays ne satisfaisant à aucune règle anti-blanchiment et de financement du terrorisme. Il s’agit essentiellement de la Corée du Nord et de l’Iran.

La liste grise regroupe les pays dont les systèmes juridiques et financiers présentent de sérieux risques de blanchiment. Ces pays doivent entreprendre des actions substantielles pour améliorer leur fonctionnement.

La lutte contre le blanchiment d’argent est un processus continu. Elle nécessite une collaboration étroite entre les acteurs nationaux et internationaux. Les réglementations et les méthodes évoluent constamment pour s’adapter aux nouvelles tendances et aux défis émergents dans ce domaine.

4. Les directives de la Commission européenne (AML KYC).

En tant qu’un des marchés principaux du monde économique occidental, l’Europe se devait de suivre les recommandations du GAFI. La première Directive date de 1991,a lors que l’Union européenne s’appelait encore la Communauté européenne.

Les directives de la Commission européenne en matière de lutte contre le blanchiment d’argent, adoptées depuis 1991, ont joué un rôle crucial. Elles ont permis d’harmoniser les efforts des États membres de l’Union européenne (UE). L’objectif était de prévenir et de combattre efficacement le blanchiment d’argent.

Voici les plus récentes dispositions dans ce contexte :

Directive (UE) 2015/849 – 4e DAB : Cette directive, également connue sous le nom de Quatrième Directive Anti-Blanchiment (4e DAB), a été adoptée en 2015. Elle établissait des mesures visant à renforcer la prévention du blanchiment d’argent et du financement du terrorisme. Parmi les points clés figuraient l’obligation de diligence raisonnable renforcée. Il y avait aussi la mise en place de registres des bénéficiaires effectifs, ainsi que la coopération entre les autorités nationales.

Directive (UE) 2018/843 – 5e DAB : En 2018, la Cinquième Directive Anti-Blanchiment (5e DAB) a été adoptée pour renforcer davantage le cadre existant. Elle introduit des modifications importantes. Cela inclut l’élargissement de la portée des personnes politiquement exposées (PPE) et des mesures renforcées en matière de vigilance. Des dispositions ont également été mises en place pour améliorer la coopération entre les autorités nationales.

Une disposition importante, souvent passée sous silence, mérite d’être soulignée. Il s’agit de l’augmentation significative des sanctions à l’encontre des professionnels qui ignorent les dispositions de la 4e Directive.

Directive (UE) 2019/2177 – Modifiant la 4e DAB : Adoptée en 2019, cette directive vise à combler certaines lacunes et à renforcer davantage le cadre réglementaire existant.

Directive (UE) 2021/1821 – Modifiant la 4e DAB : Adoptée en 2021, cette directive introduit des amendements pour améliorer l’efficacité des mesures de prévention du blanchiment d’argent. Cela comprend aussi des dispositions relatives aux crypto-actifs et aux monnaies virtuelles.

Les principales dispositions de ces directives incluent plusieurs exigences. Parmi celles-ci, on trouve la mise en place de procédures de diligence raisonnable et la tenue de registres transparents des bénéficiaires effectifs. Il est également exigé d’identifier et de vérifier les clients, de déclarer les transactions suspectes, ainsi que d’appliquer des sanctions et des mesures dissuasives en cas de non-conformité.

Il est important de noter que ces directives sont mises en œuvre par les États membres dans leur législation nationale. Les autorités nationales sont chargées de superviser et d’appliquer ces dispositions dans le cadre de leurs compétences. Ces directives visent à créer une approche cohérente et harmonisée au sein de l’UE pour lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.

5. Les dispositions majeures de la 4° Directive de 2015

Nous sommes à ce jour sous le coup des dispositions de la 4° Directive. Globalement, la Directive doit promouvoir la transparence dans la vie économique Passons en revue les points majeurs :

Quelles sont les professions visées par la Directive ?

L’article 2 de la Directive énumère les professions visées. Retenons qu’il s’agit essentiellement les activités à caractère financier (y compris les assurances) & juridique, en lien avec les entreprises.

Donc les banques, les assurances, les Experts-comptables, Commissaires aux comptes, conseillers & consultants, les Avocats intervenant dans des entreprises, etc …

Sans oublier les agents immobiliers !

Il faut noter que la taille des entités visées n’entre pas en ligne de compte. La Directive s’applique aussi bien à une entrepreneur individuel qu’à une très grande entreprise.

Politique interne anti-blanchiment, sensibilisation et formation au sein de l’entreprise :

Les entités visées à l’article 2 ci-dessus doivent obligatoirement disposer d’un document définissant leur politique interne. Ce document doit également désigner un ‘Compliance Manager’, responsable des questions LCB/FT. Ce document doit être disponible à tous les membres de l’entreprise.

La formation des collaborateurs est une démarche obligatoire, ainsi qu’une mise à jour annuelle de leur connaissances (au minimum).

La notion de Bénéficiaire Effectif

Toujours dans un esprit de transparence de la vie économique, la Directive redéfinit la notion de Bénéficiaire Effectif, afin de connaître le propriétaire réel d’une Personne morale. L’article 3. de la Directive définit comme suit la notion de Bénéficiaire Effectif.

L’article 30 de la Directive découle directement de l’article 3. Il vise la création d’un registre officiel des bénéficiaires économiques. Chaque État européen doit créer un registre électronique. Ce registre recense tous les bénéficiaires effectifs des personnes morales situées sur son territoire. Il est impératif pour les Bénéficiaires effectifs de s’enregistrer, sous peine de sanctions.

Nous avons une position mitigée vis-à-vis du dernier paragraphe de l’article 30. Celui-ci donne, d’une certaine manière, la possibilité de restreindre fortement l’accès aux registres. Fort malheureusement, d’aucuns ont tendance à en faire usage de cette disposition pour ne pas satisfaire aux besoins de transparence.

La notion de risque et la vigilance

L’article 8 de la Directive évoque les risques de blanchiment qui peuvent être généralement rencontrés dans un pays, un secteur d’activité ou une entreprise ainsi que les mesures à prendre pour identifier & évaluer ces risques.

Au niveau de l’entreprise, il y a lieu d’identifier les risques spécifiques qu’elle pourrait rencontrer en entrant en relation avec une autre entité.

Les articles 11 & 13 introduisent la notion de vigilance :

Art. 11 >> Les États membres veillent à ce que les entités assujetties appliquent des mesures de vigilance à l’égard de leur clientèle dans les cas suivants :

a) lorsqu’elles nouent une relation d’affaire

b) ….

Art.13 >> 1. Les mesures de vigilance à l’égard de la clientèle comprennent :

a) l’identification du client et la vérification de son identité, sur la base de documents, de données ou d’informations obtenus d’une source fiable et indépendante;

b)

Nous sommes ici en face de dispositions très importantes et fréquemment méconnues.

Tout d’abord, il est requis d’identifier les personnes et les risques qui y sont liés AVANT de débuter la relation d’affaire. Ensuite, l’identification précise des personnes physiques est essentielle. Elle permet de détecter deux catégories de personnes à risque.

Les Personnes Politiquement Exposées (PPE) et leurs proches : ce que vous devez savoir

Une Personne Politiquement Exposée (PPE) désigne une personne ayant occupé ou occupant encore des fonctions politiques importantes. Cela peut être à l’échelle locale, régionale, nationale ou internationale. Parmi ces fonctions, on retrouve les chefs d’État, membres de gouvernement, hauts fonctionnaires ou dirigeants d’entités publiques ou para-publiques.

Cette définition, inscrite dans les législations relatives à la lutte contre le blanchiment d’argent (LBA) et le financement du terrorisme (CFT), a pour objectif d’identifier les personnes à risque. Ces dernières pourraient utiliser leur influence à des fins illicites.

Pourquoi les PPE sont-elles sous surveillance accrue ?

Les PPE attirent une vigilance particulière en raison de leur potentiel d’influence dans les sphères politiques et économiques. Leur accès à des ressources financières significatives pourrait être détourné à des fins comme :

  • le blanchiment d’argent,
  • le financement d’activités terroristes,
  • ou d’autres activités illicites.

Pour limiter ces risques, des mesures de vigilance renforcée sont obligatoires, notamment :

  • l’identification détaillée des PPE,
  • une surveillance continue des transactions,
  • et une documentation exhaustive pour garantir la conformité réglementaire.

Qui sont les proches des PPE (RCA) ?

Les proches des PPE, aussi appelés RCA (Relatives or Close Associates), incluent les membres de leur famille et leurs associés proches. En raison de leur lien étroit avec une PPE, ces individus sont également considérés comme présentant des risques similaires. Ils sont donc soumis aux mêmes obligations de surveillance.

Obligations pour les institutions financières et non financières

Les institutions, qu’elles soient financières ou non, ont pour obligation de :

  1. Identifier les PPE et leurs proches grâce à des processus robustes.
  2. Évaluer les risques associés à chaque transaction ou relation d’affaires.
  3. Documenter et surveiller les activités pour garantir une conformité stricte avec les lois anti-blanchiment et anti-terrorisme.

Ces démarches contribuent à sécuriser le système financier. Elles limitent également les abus liés aux fonctions politiques ou aux relations proches des PPE.

Les personnes et entités sanctionnées

Tous les grands pays du monde ont établi des listes de sanctions. Celles-ci visent les personnes morales ou physiques liées à la délinquance dans divers secteurs d’activité.

Les personnes identifiées sur ces listes présentent un risque important. Chaque liste est basée sur un texte légal qui précise les restrictions liées aux personnes. En outre, ces textes prévoient des sanctions pénales et/ou financières pour ceux qui enfreindraient les dispositions en la matière.

Ces textes légaux étant très nombreux et complexes, il est recommandé de prendre des précautions. Il est préférable de bannir systématiquement toute relation avec une entité figurant sur une liste de sanctions.

Détection d’opérations délictueuses et coopération avec les entités officielles

Il n’est pas exclu qu’une société ayant de saines pratiques anti-blanchiment se retrouve face à un client suspect. Ce client pourrait pratiquer ou tenter de réaliser des opérations de blanchiment.

Dans ce genre de situation, il existe une obligation de signaler les faits aux Autorités publiques. La Directive institue l’obligation pour les Pays membres de disposer d’une Cellule de Renseignement Financier (CRF). Elle va examiner les dénonciations de blanchiment et les traiter. C’est, par exemple, Tracfin, pour la France.

Une fois le signalement effectué, les opérations soupçonnées de blanchiment ne peuvent pas être exécutées. Elles ne peuvent l’être que si elles sont autorisées par le CRF.

Le signalement est légalement entouré de la plus grande discrétion. Il ne doit pas en être fait mention au Client.

L’entité qui ne signalerait pas une opération de blanchiment sera considérée comme complice. Autant dire que dans le moindre cas de soupçon de  blanchiment, il faut faire un signalement pour éviter d’être considéré comme complice des faits.

6. Sanctions internationales : définition, impacts et obligations pour les entreprises

Les sanctions internationales sont des mesures prises par des États ou des organisations internationales. Cela inclut des entités comme les Nations Unies ou l’Union Européenne, visant à garantir la sécurité internationale. Elles servent à répondre à des actions considérées comme une menace pour :

  • la paix,
  • la sécurité,
  • ou les droits de l’homme.

Types de sanctions internationales

Ces mesures peuvent inclure :

  • Sanctions économiques : restriction ou interdiction des activités commerciales et financières avec les pays ciblés.
  • Sanctions politiques : restrictions diplomatiques ou embargos spécifiques.

L’objectif principal est de faire pression sur les entités visées afin qu’elles se conforment aux normes internationales.

Sanctions européennes : rôle et mise en œuvre

Au sein de l’Union Européenne, les sanctions sont décidées principalement par le Conseil de l’Union Européenne. Elles s’appliquent :

  • aux pays membres,
  • et aux entreprises opérant dans l’Union.

Les sanctions européennes incluent :

  • le gel des avoirs,
  • des restrictions sur l’échange de biens et services,
  • et l’interdiction de transactions financières.

Les entreprises non conformes s’exposent à des sanctions financières sévères et à des poursuites pénales.

Impact de la 4e Directive européenne contre le blanchiment d’argent

La 4e Directive européenne impose des obligations strictes en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Elle prévoit :

  1. Sanctions financières et pénales pour les infractions.
  2. Surveillance renforcée des transactions et des relations avec des partenaires étrangers.

Les entreprises doivent ainsi :

  • vérifier leurs relations commerciales,
  • et éviter tout lien avec des entités impliquées dans des activités illicites.

Les risques médiatiques : une conséquence souvent ignorée

Outre les sanctions légales, un autre danger réside dans les répercussions médiatiques. Si une entreprise ou un professionnel européen est impliqué, volontairement ou non, dans des activités de blanchiment, cela peut :

  • ternir leur réputation,
  • ruiner leur crédibilité professionnelle.

Une simple négligence peut avoir des conséquences dévastatrices. D’où l’importance de respecter les règles légales et éthiques en matière de sanctions internationales.

7. Considérations générales

Nous avons évoqué ci-dessus un certain nombre de points qui nous semblaient importants pour les entités visées par l’art.2 de la 4° Dir.

Enjeux de Confidentialité et de Protection des Données :

La collecte d’informations dans le cadre des Directives anti-blanchiment amènent les entités soumises à collecter des informations parfois sensibles. Les Directives prévoient une durée de conservation des données d’au moins 5 ans. On pourrait considérer que cette règle va à l’encontre des règles prévues par le RGPD. Mais les Directives anti-blanchiment ne souffrent pas d’exception. C’est 5 ans, au minimum.

Le secteur financier parallèle ou informel

Dans certaines cultures subsiste un secteur financier informel basé essentiellement sur la confiance. C’est le Hawala, fréquent dans les communautés & pays musulmans, le sous-continent indien ou l’Asie du sud-est.

On parle aussi d’un « shadow banking » en Chine et dans les communautés chinoises de par le monde.

Ce genre de pratique remonte à la nuit des temps. Elle est notamment une des bases de la richesse des Templiers au Moyen-âge.

De nos jours, le secteur financier informel échappe aux réglementations et contrôles des autorités. Il a ainsi été détourné par les criminels pour faciliter leurs opérations délictueuses. Pleinement conscientes du détournement du système, les Autorités gardent un œil très attentif sur ce genre de pratiques.

Mise en Œuvre par les Institutions Non Financières :

Certaines institutions non financières telles que les ONG ne sont pas spécifiquement visées à l’art.2 de la 4° Dir.. Même si elles peuvent être en contact avec d’autres ONG servant à des opérations de blanchiment ou à des opérations de financement du terrorisme.

Nous sommes d’avis que les ONG doivent être conscientes de cet état de fait. Et elles doivent participer à la lutte contre le financement du terrorisme.

Un certain nombre d’organisations susceptibles de financer le terrorisme, ainsi que leurs membres importants, figurent dans les listes de sanctions internationales. Ces mesures visent à limiter leur influence et leurs activités. Une consultation régulière de ces listes de sanctions nous semble primordial.

8. Coopération internationale dans la LCB/FT

Étant donné la nature transnationale des activités de blanchiment, les Directives ont prévu une coopération internationale. Celle-ci implique les CRF des pays européens ainsi que des pays développés. Pour assurer une surveillance efficace, les pays doivent échanger des informations. Ils doivent également collaborer afin de prévenir le blanchiment d’argent à l’échelle mondiale. Les organisations internationales jouent souvent un rôle clé en facilitant cette collaboration.

L’AMLA, l’évolution des Normes et des Directives en LCB/FT et leur mise en oeuvre :

En juillet 2022, le Conseil européen a décidé de la création de l’AMLA (Anti Money Laundering Authority). Son siège sera situé à Francfort et sa mission sera d’assurer une meilleure efficacité dans l’application de la LCB/FT dans l’UE.

L’AMLA devra veiller à l’évolution et l’application des normes et directives de LCB/FT pour s’adapter aux nouvelles menaces. Les États membres de l’Union Européenne devront suivre ces évolutions. Ils devront ajuster leurs politiques nationales en conséquence pour rester efficaces dans la lutte contre le blanchiment d’argent.

9. Nouvelles Méthodes en Ligne, Cryptomonnaies et Blanchiment d’Argent

Les avancées constantes dans les applications financières en ligne, telles que les plateformes de jeu, les marchés numériques et les services de transfert d’argent, offrent de nouvelles opportunités. Celles-ci facilitent notamment les activités de blanchiment d’argent.

En raison de leur nature pseudonyme et de la décentralisation de leurs transactions, les cryptomonnaies présentent des défis significatifs. Cela complique la détection du blanchiment d’argent. Les criminels exploitent l’anonymat offert par les crypto-actifs pour effectuer des transactions financières opaques et échapper à la surveillance traditionnelle.

Il va de soi que toutes les mesures réglementaires s’appliquent aux activités en ligne. Les plateformes et autres intervenants sont légalement tenus de mettre en œuvre toutes les mesures anti-blanchiment. En cas de non-respect, ils risquent de lourdes sanctions.

10. Lexique

1. AML 
Définition :
AML signifie « Anti-Money Laundering », soit la lutte contre le blanchiment d’argent en français (LCB/FT). Ce terme désigne l’ensemble des dispositifs, des lois et des règlements adoptés. Leur objectif est de détecter, prévenir et signaler les activités visant à dissimuler l’origine de fonds provenant d’activités illicites.

Le blanchiment d’argent est une pratique par laquelle des fonds obtenus illégalement sont ‘blanchis’ pour les rendre légitimes. Ces fonds sont ensuite réinjectés dans le système économique classique. Le cadre AML est une réponse mondiale et coordonnée visant à minimiser cette pratique. Il garantit également que le secteur financier ne soit pas utilisé pour soutenir des activités criminelles ou terroristes. Les mesures AML incluent la collecte d’informations sur les clients (KYC = ‘Know Your Customer’), la surveillance des transactions, les contrôles et audits internes, ainsi que la formation des employés.

Le terme AML est largement employé dans les secteurs financiers, bancaires, juridiques, ainsi que dans les industries exposées aux risques de fraude et de corruption. En raison des standards stricts imposés par le GAFI et d’autres organismes de régulation internationaux, l’acronyme AML est devenu central pour garantir la conformité et la responsabilité dans le secteur financier.

2. AML Compliance
Définition :
La ‘conformité AML’ (Anti-Money Laundering Compliance) désigne l’ensemble des processus, des procédures et des politiques qu’une organisation doit mettre en place. Cela concerne particulièrement les secteurs juridiques, bancaires et financiers pour prévenir et détecter le blanchiment d’argent et les activités financières illicites. Elle inclut également la lutte contre le financement du terrorisme (CFT – Counter Financing of Terrorism).

Avec l’augmentation des régulations financières et la globalisation des activités, les institutions financières et les entreprises exposées au risque de blanchiment d’argent doivent respecter des normes de conformité strictes. L’AML Compliance implique de connaître les clients, selon le principe ‘Know Your Customer’ (KYC), de vérifier leurs antécédents financiers et d’identifier les transactions suspectes. Les entreprises doivent également former leur personnel, adopter des technologies de détection (ex : systèmes de surveillance des transactions) et suivre des procédures de déclaration d’activités suspectes (SAR – Suspicious Activity Report). Des régulateurs tels que Tracfin en France, la CETIF en Belgique, la FINMA en Suisse, la FCA au Royaume-Uni, et la SEC aux États-Unis supervisent les conformités AML.

Le cadre réglementaire de conformité AML s’est renforcé avec des régulations telles que le Règlement AMLD5 et AMLD6 en Europe. Il inclut également les recommandations du Groupe d’action financière (GAFI). La non-conformité expose les entreprises à des amendes conséquentes et à des pertes de réputation significatives.

3. AML Finance
Définition :
Dans le secteur financier, ‘AML Finance’ fait référence à l’ensemble des activités et des processus mis en œuvre par les institutions financières pour lutter contre le blanchiment d’argent (Anti-Money Laundering, AML). Ce terme englobe toutes les méthodes et technologies dédiées à l’identification et à la prévention des flux financiers illicites, ainsi que des transactions suspectes pouvant être utilisées pour blanchir de l’argent. Cela inclut l’analyse des comportements des clients, la surveillance des transactions en temps réel et la mise en place de contrôles internes pour détecter les activités suspectes.

La finance est un domaine particulièrement exposé au risque de blanchiment d’argent. Cela est dû à la variété et au volume des transactions, ainsi qu’à la rapidité avec laquelle elles s’opèrent. Les établissements financiers doivent donc adopter des pratiques AML robustes. Ils doivent être capables de surveiller et d’identifier les transactions inhabituelles ou suspectes. De plus, ils doivent connaître les clients ainsi que les bénéficiaires effectifs des comptes. Pour améliorer les capacités de détection et d’analyse des données transactionnelles, des technologies avancées sont utilisées. L’intelligence artificielle (IA), l’apprentissage automatique (machine learning) et l’analyse de données en font partie.

En finance, les dispositions AML exigent également que les institutions effectuent des audits internes réguliers. Ils instaurent des évaluations de risques et collaborent avec les régulateurs et les autorités gouvernementales. Le respect des standards internationaux de l’AML permet de garantir la sécurité et la transparence dans la gestion des capitaux.

4. AML Banque
Définition :

Dans le contexte bancaire, AML désigne les efforts et les mesures prises par les banques pour lutter contre le blanchiment d’argent. Les politiques AML en banque sont spécifiquement conçues pour s’assurer que les institutions financières respectent les lois nationales et internationales. Cela minimise les risques de fraude et de financement des activités illicites.

Les banques jouent un rôle crucial dans la lutte contre le blanchiment d’argent en raison de leur position dans le système financier mondial. Elles sont tenues, par les régulations, de mettre en place des procédures AML. Cela leur permet de surveiller leurs transactions, d’identifier leurs clients et de signaler les activités suspectes. Ces programmes incluent également des contrôles de due diligence pour les nouveaux clients. Ils comportent une évaluation approfondie des risques liés aux transactions, ainsi qu’une collaboration étroite avec les autorités de régulation.

Dans un contexte de régulation renforcée, les banques sont soumises à des audits fréquents. Elles doivent maintenir des documents complets et transparents concernant la provenance des fonds et l’historique des transactions de leurs clients. De plus, elles investissent massivement dans des systèmes de compliance numérique. Ces systèmes intègrent l’analyse de données en temps réel pour gérer le volume de données de manière optimale et efficace.

5. KYC (Know Your Client)
Définition :
Know Your Client (KYC) désigne l’ensemble des pratiques et processus par lesquels une organisation vérifie l’identité de ses clients. Cela inclut des établissements comme les banques ou d’autres institutions financières. L’objectif est d’assurer que le client est bien celui qu’il prétend être. Cela se fait en identifiant ses informations personnelles et financières. Les documents officiels comme le passeport, le justificatif de domicile et les relevés bancaires sont souvent utilisés pour cette vérification. Ce processus est crucial pour prévenir la fraude, le blanchiment d’argent, et d’autres activités illégales.

En Europe, les réglementations KYC sont devenues de plus en plus strictes, renforcées par des directives européennes comme la 4e et la 5e directives contre le blanchiment de capitaux, ainsi que par la nouvelle Directive 2024/1640 et le Règlement 2024/1624 de mai 2024. Aujourd’hui, la mise en œuvre de procédures KYC est essentielle pour toute entreprise opérant dans le secteur financier. Cela s’applique également aux secteurs sensibles comme les services immobiliers, les assurances, et les crypto-actifs. Les entreprises doivent investir dans des technologies de vérification d’identité et de gestion des données. Cela peut représenter un coût significatif. En cas de non-conformité, elles s’exposent à de lourdes amendes, voire à des interdictions d’exercer. Les sanctions médiatiques et financières liées à des manquements KYC peuvent ruiner la réputation d’une entreprise. Cela souligne l’importance de maintenir une conformité stricte et continue.

AML FT (Anti-Money Laundering and Financing of Terrorism)
Définition :

Anti-Money Laundering and Financing of Terrorism (AML FT) est un terme regroupant toutes les mesures et pratiques destinées à empêcher le blanchiment de capitaux (AML, Anti-Money Laundering) et le financement du terrorisme (FT, Financing of Terrorism). Ces pratiques comprennent la détection, le signalement, et la prévention des flux financiers suspects liés à des activités criminelles ou terroristes. Les entreprises sont tenues de surveiller les transactions, d’identifier les clients et de signaler tout comportement suspect aux autorités compétentes.

En Europe, les réglementations AML CFT ont été considérablement renforcées ces dernières années, notamment grâce aux directives européennes qui imposent des obligations strictes aux entreprises. Les institutions financières, pour leur part, ont l’obligation de suivre attentivement les transactions de leurs clients et d’alerter les régulateurs en cas d’activité suspecte.

 Pour les entreprises, la conformité à l’AML FT implique souvent l’adoption de technologies avancées de détection des fraudes et de gestion des risques, comme l’intelligence artificielle et l’analyse de données, ce qui engendre des coûts supplémentaires. La non-conformité peut entraîner des sanctions sévères, comprenant des amendes lourdes et une atteinte à la réputation. En 2020 et 2021, plusieurs banques européennes ont été sanctionnées pour des manquements AML, illustrant l’impact sérieux de ces réglementations sur les entreprises. Cela les oblige à investir davantage dans des systèmes de contrôle rigoureux, des formations, et des audits internes pour réduire les risques liés au blanchiment d’argent et au financement du terrorisme.

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